Rails creusés, essieux abîmés, dix millions d’euros de préjudice: les feuilles mortes qui s’accummulent sur les voies coûtent cher au réseau SNCF Transilien. « Une petite feuille peut faire patiner un train qui pèse je ne sais de combien de tonnes et abîmer toute la structure », explique Philippe Lebarbier, agent d’accompagnement, 32 ans de métier dans l’entreprise ferroviaire.
« Quand un amas de feuilles se pose sur les rails, cela crée une pellicule glissante, le contact entre l’essieu et le rail ne se fait plus. Donc cela fait une sorte d’aquaplanning comme un véhicule routier sur une flaque d’eau », précise Stéphane Héry, responsable logistique Engins de Paris Nord. Sur le tronçon ferroviaire nord, les dégâts causés par les feuilles sur les rails sont visibles. Ce tronçon fait partie des secteurs sensibles avec notamment 50 kilomètres traversés en zones boisées et voit défiler 550 trains RER et TER par jour, sans compter les trains de marchandises.
« Ca c’est l’empreinte de patinage due aux feuilles » dit M. Lebarbier, montrant des stries laissées sur le rail. « On peut supposer qu’ici il y avait des feuilles et quand la machine est arrivée dessus elle a patiné ». Des agents de terrain en gilet orange fluo inspectent les voies, notent les empreintes de patinages. Puis les draisines, engins de 22 tonnes équipés de brosses métalliques, entrent en action.
« J’ai un interrupteur qui permet de baisser et monter les brosses (…) Ce passage permet de sécuriser les voies, d’assurer la régularité des trains », explique le conducteur Anthony Haudiquet qui participe à sa quatrième campagne anti-feuilles.
Suivent des wagons laveurs avec « des jet d’eau de 1.000 bars de pression pour nettoyer le gras », précise M. Héry en montrant une remorque à deux citernes stationnées au Bourget (Seine-Saint-Denis).
Priorité à la sécurité
Lorsque les essieux et les roues sont sérieusement abîmés, le train est envoyé au technocentre de Villetaneuse. « Quand il y a des défauts hors tolérance, nous on passe au tour, on reprofile complètement la roue, on fait des réglages des freins et le train peut repartir en ligne », explique Pascal Jolivet, agent de maintenance. Les rames en réparation réduisent le nombre de trains en circulation, mais la sécurité reste prioritaire. « Avec l’enrayage, on risque de ne pas freiner à la bonne distance et ainsi créer des problèmes de sécurité par rapport au franchissement d’un passage à niveau ou d’un aiguillage derrière », note Stéphane Héry.
Au total « une centaine de personnes dont 60 opérateurs terrains » sont mobilisées en Ile-de-France sur cette campagne pendant la période automnale, qui dure de mi-octobre à mi-décembre. Par endroits, les arbres sont élagués « pour éviter qu’ils fassent comme un tunnel, que les feuilles tombent tout droit sur les voies ferrées », ajoute M. Lebarbier.