Voilà des éléments qui pourraient compromettre la défense de SNCF lors du futur procès. La compagnie aurait voulu "manipuler l'enquête" sur la catastrophe ferroviaire de Brétigny-sur-Orge (Essonne), qui avait fait sept morts en juillet 2013 après le déraillement d'un train, affirme le Canard Enchaîné dans son édition de ce mercredi. L'hebdomadaire, qui dit avoir eu accès à de "nombreuses pièces de l'enquête", révèle que des dirigeants de la SNCF ont été placés sur écoute par les juges.
Ces écoutes mettent en évidence "un double langage" de la part de certains témoins, selon le Canard Enchaîné. Comme ce cadre qui déclare dans une conversation interceptée: "Brétigny, c'est des crevards. Faut tous les foutre dehors!", mais qui assure ensuite aux juges ne pas savoir si les travaux de maintenance y sont correctement menés.
"Moi, je t'invite à ne rien apporter"
L'hebdomadaire affirme par ailleurs que des employés de la SNCF ont été préparés par leurs dirigeants en vue de leur audition par la justice. Chaque cheminot concerné par l'enquête aurait été "invité à un entretien avec le service juridique" de la compagnie, suivie d'un débriefing après son audition par les enquêteurs.
"Moi, je t'invite à ne rien apporter [aux policiers, NDLR]… Tu viens avec rien… Il faut attendre leurs demandes", déclare ainsi à un cheminot une cadre au service juridique, chargée, selon l'hebdomadaire, de préparer les employés.
La SNCF déjà mise en examen
Le déraillement à Brétigny d'un train Paris-Limoges a été provoqué par une éclisse –sorte de grosse agrafe sur l'aiguillage-, dont une fissure n'avait pas été détectée lors des tournées de surveillance et dont trois des quatre boulons s'étaient cassés ou dévissés. L'éclisse avait alors pivoté, provoquant l'accident.
L'ensemble des rapports d'expertise arrivent à la conclusion qu'un défaut de maintenance sur les voies est à l'origine de l'accident. Depuis l'ouverture d'une information judiciaire par le parquet d'Evry, seules deux personnes morales ont été mises en examen, la SNCF et Réseau ferré de France (RFF), toutes deux mises en cause pour homicides et blessures involontaires. Trois cheminots de la SNCF, chargés de la surveillance des voies au moment du déraillement, ont par ailleurs été placés mi-janvier sous le statut de témoin assisté.