G. Larcher, Président du Sénat, Sénateur des Yvelines,
ancien maire de Rambouillet
Loi travail : la majorité sénatoriale veut enterrer les 35 heures
Un mois après son adoption par l’Assemblée nationale avec l’aide du 49.3, le projet de loi de réforme du code travail est examiné, en séance, par le Sénat, à partir du lundi 13 juin. Les groupes LR et UDI-UC, majoritaires au Palais du Luxembourg, ont l’intention de réécrire en profondeur le texte. Ils souhaitent rétablir certaines dispositions initialement prévues et en ajouter d’autres, qui suppriment toute une série d’obligations pesant sur les employeurs. Les débats vont livrer un avant-goût des réformes économiques et sociales que la droite cherchera à mettre en place, en cas d’alternance en 2017.
Le texte transmis au Sénat a été tellement remanié depuis la première version rendue publique à la mi-février qu’il est « rabougri », selon la formule du rapporteur, Jean-Baptiste Lemoyne (LR, Yonne). La majorité sénatoriale s’est donc attachée à le remplumer, lors de son examen en commission des affaires sociales, en restaurant des mesures soustraites à la demande des syndicats, puis des députés socialistes.
C’est le cas du plafonnement des indemnités prud’homales en cas de licenciement abusif. Ou encore le fait de retenir l’échelon du territoire français pour apprécier les difficultés d’un groupe international qui veut congédier des salariés dans sa filiale tricolore. Comme dans la précédente version, les entreprises de moins de cinquante personnes pourraient proposer à leurs salariés, même en l’absence d’un accord collectif, de passer au forfait en jours (un système où le temps de travail est décompté en jours et non pas en heures).
« Le sens de l’histoire »
D’autres dispositions du texte issu des débats à l’Assemblée ont été retouchées. L’idée de donner la primauté aux accords d’entreprise sur les accords de branche en matière de temps de travail est conservée. Mais un changement de taille est opéré : ceux-ci devront, comme aujourd’hui, recueillir l’imprimatur d’organisations syndicales totalisant au moins 30 % des voix aux élections professionnelles. Le gouvernement souhaitait porter ce chiffre à 50 %. Mais certains responsables patronaux et syndicaux jugeaient cette barre difficile à franchir, d’après M. Lemoyne. D’où la décision prise par les sénateurs de la ramener à 30 %. Toutefois, le rapporteura indiqué, le 8 juin, devant l’Association des journalistes d’information sociale : « Je vais essayer d’afficher que nous ne renonçons pas au principe majoritaire, qui reste un objectif et qui va dans le sens de l’histoire. »
En matière de temps de travail, toujours, la majorité sénatoriale a supprimé la notion de durée légale du travail pour la remplacer par celle de « durée de référence ». Celle-ci devrait être fixée par « accord collectif » ; à défaut, les salariés passent aux 39 heures. Exit, donc, l’une des conquêtes des lois Aubry de 1998 et de 2000.
Plusieurs innovations introduites à la faveur du texte sont, par ailleurs, supprimées (compte engagement citoyen, responsabilité sociale des plates-formes numériques type Uber…). Enfin, des amendements ont été votés pour soutenir l’apprentissage et le pouvoir d’achat des salariés (réduction du « forfait social » pour l’ensemble des sommes versées au titre de la participation et de l’intéressement).