La Cour des comptes estime que la SNCF doit restreindre le nombre de billets de train gratuits dont bénéficient les cheminots et surtout leurs familles, et elle s’emploie à le rappeler à la direction de l’établissement public. Après un premier avertissement en 2010, l’institution a transmis cet été à la SNCF un nouveau rapport provisoire sur le sujet. L’information, révélée par le « Parisien », a été confirmée par plusieurs sources aux « Echos ».
Selon un proche du dossier, aucune négociation n’a toutefois été lancée. Suite à la remise du rapport provisoire, la direction a organisé une réunion d’information avec les syndicats qui le souhaitaient. Le sujet ne devrait être abordé formellement en conseil d’administration qu’une fois le rapport définitif connu, sans doute d’ici à la fin de l’année. Alors que le prix des billets TGV suscite régulièrement la grogne du public, le fait que les cheminots en activité ou retraités mais aussi leurs conjoints, leurs enfants, et même leurs parents et grands-parents, bénéficient de billets gratuits ou quasi gratuits, est souvent vu comme un privilège. Le prix du billet n’est que de 1,50 euro en période normale, et entre 8 et 13 euros en période de pointe, que ce soit en première ou en seconde classe, et ce jusqu’à 8 fois par an.
« C es facilités de circulation concernent 843.217 cheminots, retraités, conjoints, enfants et veufs », écrivait la Cour des comptes en 2010, chiffre auquel il faut ajouter les ascendants. L’institution estimerait le coût pour l’entreprise à 140 millions d’euros.
Evaluations divergentes
Selon un tract de la CFDT, l’estimation de la SNCF serait de 110 millions, mais des évaluations nettement inférieures circulent également : le chiffre de 140 millions correspondrait au montant total du prix des billets si ceux-ci avaient été payés au prix fort. « Or de nombreux bénéficiaires n’auraient tout simplement pas pris le train dans ces conditions », avance Sud-Rail. De source syndicale, l’un des principaux points de la réponse de la SNCF à la Cour portera sur l’évaluation du manque à gagner.
Selon nos informations, le nouveau rapport de l’institution de la rue Cambon comporte 13 recommandations. Il propose notamment de supprimer pour les nouveaux embauchés les facilités de circulation pour les ascendants, et demande également de rétablir des lignes et des plages horaires où l’utilisation de ces billets serait proscrite. Une disposition un temps pratiquée, mais qui a été abandonnée.
La remise en cause potentielle de cet acquis suscite l’opposition farouche des syndicats. Mais ouvrir le dossier aujourd’hui n’emballe pas non plus la direction. Avec la réforme des retraites, le mois prochain, et surtout la réforme ferroviaire, qui devrait passer en Conseil des ministres en octobre, la direction de l’entreprise surveille sa météo sociale comme le lait sur le feu. Dans ce contexte, elle ne souhaite certainement pas toucher à ce qui est considéré par les cheminots comme un « marqueur de leur identité », selon un expert, et cristalliser leur mécontentement. Les velléités de remise en cause (ou de dépoussiérage) attendront donc sans doute quelques mois.